La prévision de trésorerie est indispensable aujourd’hui afin de connaître le « cash » disponible à un horizon donné, et savoir si celui couvrira le besoin en financement ou en placement.

Dans le contexte actuel, comment les entreprises appréhendent-elles le sujet de la prévision de trésorerie ?

Il y a quelque chose de paradoxale quand on parle de prévision de trésorerie. Plus le contexte économique et financier n’est changeant et incertain et plus les directions générales et directions financières veulent des prévisions de trésorerie fiables et dynamiques.
Plus on manque de visibilité sur l’évolution économique, plus on en veut sur sa trésorerie.
On l’a vu clairement avec la crise du Covid-19. Il y a eu deux temps dans la réaction des entreprises vis-à-vis de leur trésorerie :
Tout d’abord, les entreprises se sont focalisées sur leur trésorerie très court terme. Est-ce que nous avons assez de cash pour faire face aux prochaines échéances ? La prévision très court terme était souvent déjà plus ou moins faite dans les entreprises. Beaucoup en ont profité pour élargir ce process à l’ensemble des filiales.
Le second temps correspond au moment où les entreprises ont dû repenser leurs financements. Elles ont renégocié leurs échéances d’emprunt, mis en place des PGE (Prêt garanti par l’État). Cela les a obligés à élargir leur horizon prévisionnel jusqu’à 2 à 3 ans. Souvent cela a été un vrai changement.

Quels sont les conseils clés pour la mise en place de prévisions de trésorerie ?

En premier lieu, il faut se lancer et être persévérant. On est bien dans le domaine du prévisionnel donc c’est normal que tout ne soit pas correct du premier coup. L’analyse des écarts entre le réel et le prévisionnel va permettre de comprendre pourquoi on a des écarts et de s’améliorer. Plus on s’investit dans la tâche de production de prévisions et meilleures seront ces prévisions.
Dans un second temps, il faut valider la fiabilité des données sources. Des données sont mises à jour directement de la solution de gestion de trésorerie et elles peuvent être enrichies par des données importées de l’ERP. Si on veut de l’information fiable, il faut que ces données soient fiables.
Par exemple, si vous remontez une balance âgée client basée uniquement sur les dates d’échéance vous avez toutes les chances que votre prévision soit fausse sauf si vos clients respectent parfaitement leur échéance. Cependant, si vous vous basez sur les habitudes de règlement de vos clients vous allez grandement fiabiliser votre prévision d’encaissement.

Quel horizon choisir ? Prévisions de trésorerie court, moyen ou long terme ?

On a déjà l’univers du trésorier avec le court terme et le très court terme.
   ⦁ Le très court terme (2 à 3 jours): pour obtenir cette prévision, il n’y a rien à faire. Elle est mise à jour automatiquement en fonction des encaissements et des décaissements. Cette prévision très court terme va permettre d’optimiser les décisions.
   ⦁ Le court terme, souvent on parle de 13 semaines : la mise à jour se fait hebdomadairement. Cette vue va permettre d’anticiper des besoins de financement court terme. Et plus on anticipe et plus on se donne la chance de faire les bons arbitrages.
Pour ces 2 horizons, la vision consolidée de la trésorerie d’un groupe sera très intéressante. Elle permettra notamment de mettre en place des prêts/emprunts intra-groupe et donc de réduire la dette globale.

Puis on a l’univers de la direction financière. Les objectifs de la directeurs financiers seront concentrés sur la performance financière et sur la communication interne avec le COMEX (Comité exécutif) et externe avec les partenaires financiers et les actionnaires.
   ⦁ Le moyen terme: on va parler d’une prévision budgétaire de la trésorerie sur 12 mois glissants.
   ⦁ Le long terme : 3 à 5 ans, avec mise à jour annuelle avec les budgets d’exploitation et les projets d’investissement.

Quels sont les reportings à mettre en place pour le pilotage de la prévision de trésorerie ?

Parfois on dit qu’il suffit de mettre en place des KPIs pour que ceux-ci s’améliorent. Ce n’est pas vraiment le cas avec la trésorerie. Le reporting n’a de sens que si on a l’analyse qui va avec.
Les solutions de gestion de trésorerie vont permettre de faire gagner beaucoup de temps dans la construction du prévisionnel de trésorerie mais vont aussi permettre de gagner en sérieux dans l’analyse qui en sera faite.
Il y a deux sujets majeurs à prendre en compte : fiabiliser les prévisions et anticiper les besoins de financement.

Fiabiliser les prévisions :

Pour cela on va comparer le réel au prévisionnel. Et cette comparaison va nous donner des enseignements qui doivent conduire à des actions correctives soit dans la façon dont on modélise ses prévisions soit dans la manière dont on exécute sa trésorerie.

Voici un exemple :

Imaginons que les encaissements soient inférieurs aux prévisions. Il peut y avoir plusieurs raisons et même un mix de ces raisons.
   ⦁ Soit les ventes sont inférieures aux prévisions de vente
   ⦁ Soit la collecte des créances client s’est détériorée.
Il semble important de comprendre les raisons pour fiabiliser les prévisions futures en révisant le modèle ou bien en améliorant le process de recouvrement.

Anticiper les besoins de financement :

Une bonne prévision de trésorerie va nous permettre de déterminer le plus tôt possible qu’on n’a pas assez de disponibilité pour couvrir un besoin de financement.
En connaissance de cause, on va pouvoir prendre les bonnes décisions, que ce soit un pilotage interne pour diminuer ce besoin de financement, la mise en place de nouveaux financements ou encore négocier des décalages d’échéance.
Il est donc essentiel d’établir des prévisions de trésorerie afin d’avoir une gestion financière saine.